Un proche du Premier Ministre belge Elio Di Rupo me donne rendez-vous dans un célèbre bistrot bruxellois de la Place du Châtelain. « Je ne pouvais te parler au téléphone. Je veux te parler d’un sujet sensible, spécial. Que sais-tu à propos du 21 décembre ? » me lance-t-il un brin nerveux. Comme tout le monde, je suis au courant du plus gros événement de 2012. A un mois de la fin du monde, difficile d’ignorer la date fatidique prévue par le calendrier maya. Une sorte de pop-up event qui viendra clôturer en beauté ces dernières années de crise socio-économique. Un feu d’artifice planétaire grandeur nature et, fait assez rare pour le préciser, complètement gratuit. Selon les nouvelles appellations, la Venue de Nicolas, la Fête d’hiver et la Fête à Sylvestre nous promettent bombance et crise de foie. Les Mayas, eux, nous prédisent une journée d’extase totale et de franche rigolade. Une dernière ivresse, une nuit de folie. Les invitations pleuvent sur la toile. Honte à l’internaute qui n’a pas encore décroché son sésame à l’une de ces soirées branchées et qui passerait l’arme à gauche, seul dans son coin. Les commentaires sur Facebook témoignent du succès de l’opération : « Bien sûr que je participe, je ne veux pas rester toute seule sur une planète dévastée, l’angoisse! ». Seuls deux petits comiques osent un « Y aura une after de prévue ? » ou encore « J’peux pas, j’ai piscine ».
A ce jour, seuls les marchands de jouets ne se sont pas emparés de l’affaire. Pas de déguisement « cavalier de l’apocalypse » dans les rayons de Toys R Us ou de la Grande Récré. En télé, les Simpsons ont eu droit, aux Etats-Unis, à un épisode spécial fin du monde pendant Halloween. En France, Canalsat et SyFy, une chaîne thématique de science-fiction, proposent une chaîne éphémère dont les programmes s’arrêteront le 21 décembre. En presse écrite, le quotidien Libération nous a concocté un dernier quizz avant la fin du monde : 21 questions pour patienter jusqu’au 21 décembre 2012. Le compte à rebours est lancé.
A l’instar de la Toussaint, la mort fait vendre. Mais fait-elle peur ? Si certains optimistes rationnels nous rappellent que le calendrier grégorien s’arrête au 31 décembre 2012, d’autres fatalistes relèvent les signes qui témoignent d’une fin prochaine. En France, notons la reconversion de Nadine Morano en conseillère en communication et plus récemment, l’éclatement de l’UMP et la co-parentalité pour Jean-François Copé et François Fillon, une première française, bien avant la loi sur l’adoption étendue aux couples gay. En Belgique, à l’occasion d’un reportage racoleur, la chaîne publique RTBF trahit la confiance de Jade Forêt et d’Arnaud Lagardère. Un manque de tact à l’égard de la jeune maman, du vieux papa et de la vieille maman de la jeune maman.
« Que les répercussions médiatiques soient positives ou négatives, en Europe, personne ne veut assumer financièrement cet événement. Les caisses sont vides. Nous venons péniblement de boucler notre budget, Elio ne veut pas imposer davantage la population » m’assure ce proche conseiller. Le message est donc clair, pas d’artifices pour le peuple à l’occasion du 21 décembre. Pas de géants de pierre mayas sur la Grand-Place de Bruxelles. Cette année sera sobre, un sapin métallique et puis c’est tout !
Vous cherchez un endroit sympathique pour passer votre dernière fête d’hiver ? Bugarach dans l’Aude sera the place to be en cette fin d’année. Un village sympathique de 180 âmes, perdus entre brebis et montagnes. Pas sexy ? Pas sûr. Depuis plusieurs années quelques illuminés ont fait courir le bruit que cet endroit recèlerait un passage entre les mondes et qu’il symboliserait l’espoir de survie pour l’humanité. En deux coups de souris et un peu de pot, l’information a fait l’objet d’un article de la presse locale, repris par la très sérieuse AFP et ensuite relayée par la presse du monde entier. Depuis lors, le maire a dû faire face à des hordes de journalistes. Le Jour J, la rumeur annonce que des centaines de CRS viendront assurer la sécurité du bourg. Le genre de buzz dont se passerait un bled. Les chiens aboient, la caravane trépasse.
Un proche de 